Coup de cœur 2005 |
En juillet 1936, le général Franco, rapidement épaulé par Hitler et Mussolini, faisait basculer l’Espagne dans une guerre civile meurtrière qui allait embraser le pays jusqu’en 1939, tandis que les frileuses démocraties occidentales se retranchaient derrière un non-interventionnisme complice et que l’URSS de Staline monnayait son assistance contre espèces sonnantes et trébuchantes. Ce conflit dont les grandes puissances se lavèrent les mains fut, au même titre que l’invasion de la Mandchourie et que la guerre d’Abyssinie, l’un des prémices de la seconde Guerre Mondiale, et permit l’instauration en Espagne d’une dictature qui dura jusqu’à la mort du Caudillo en 1975.
Lors du pronunciamiento franquiste, Angel Sanz, fils d’un modeste quincaillier des faubourgs madrilènes, avait tout juste dix-huit ans. Les événements, assortis d’une dose de hasard et sans doute d’un certain talent pour le pilotage, le firent se retrouver pilote de ce qui était à l’époque l’un des avions de chasse les plus modernes et les plus brillants, le Polikarpov I-16 (surnommé Mosca en Espagne), ce après une formation en URSS.
Son récit autobiographique ne se limite pas à sa seule carrière de pilote : Angel Sanz, avec une faconde savoureuse, un franc-parler dénué de détours, et un humour parfois féroce, nous raconte sa vie agitée depuis sa prime enfance à sa réussite en France en tant que négociant, au terme d’un parcours pour le moins tumultueux.
Si l’amateur d’histoire de l’aviation militaire trouvera son compte dans ce livre, cet ouvrage s’avère également un témoignage de première force sur ce que fut le franquisme, ainsi que sur la difficile existence qui fut celle des Républicains espagnols, tant dans leur propre pays que dans leur exode en France. Savoureux et instructif récit d’un Angel Sanz jamais geignard (ni à court d’idées débrouillardes), nous ne pouvons qu’espérer que ce premier volume préfigure une collection que nous souhaitons riche de textes aussi édifiants et passionnants que celui-ci. Puisse ce « coup de cœur » de l’Aérobibliothèque encourager l’éditeur dans cette voie, et également amener les amateurs d’histoire de l’aviation à se tourner un peu davantage vers le récit, forme qu’ils ont parfois tendance à bouder ou à négliger.
Philippe Ballarini
– Traduction : Patrick Laureau
– 200 pages, 17,5 x 25 cm, couverture rigide
– Coup de cœur Aérobibliothèque 2005
– Les autres ouvrages de la collection Mémoires et débats