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Les avions de voltige Sukhoi

Du Sukhoi 26 au Sukhoi 31M

Un ouvrage intéressant, à plus d’un titre ! Quand on le prend en main, on peut légitimement se poser la question : comment peut-on consacrer plus de 200 pages à ce qu’on pense être simplement une monographie multiple (une multigraphie, donc) de cette poignée de réputés avions de voltige fabriqués par la firme russe ?

Mais on découvre bientôt au livre un petit côté encyclopédique très agréable, qui explique sa légère prise d’embonpoint.

Vous pouvez sauter l’avant-propos, dont nous reparlerons rapidement, en arrière-propos, avec les remerciements finaux. La vraie introduction, qui suit, est en revanche très pertinente.

L’ouvrage commence vraiment avec plusieurs éléments d’histoire, parfaits pour situer le cadre de cette étude dans son contexte aéronautique, géopolitique et économique.
Il y a tout d’abord un historique des avions de voltige soviétiques avant les Sukhoi. Cela permet de retrouver certaines machines qui faisaient les beaux jours des compétitions de voltige dans les années 70-80 et de leurs comptes-rendus dans la presse de l’époque. Cela permet aussi de comprendre l’apparition fulgurante mais aussi la faible longévité de certaines d’entre-elles. Les plus anciens qui se seraient étonnés, à une époque, des méandres des désignations des avions soviétiques (1), auront plaisir à trouver tout cela expliqué. Pour les plus jeunes, c’est l’occasion de faire connaissance avec toute cette panoplie d’appareils, qui furent parfois des colosses aux pieds d’argile (2).

Puis on passe à l’histoire de Sukhoi. Sur fond de constructions guerrières, qui sont le cœur de métier de cet avionneur, on découvre pourquoi un petit département des avions de voltige lui fut adjoint. Là-aussi, pour les désignations, ce fut parfois le souk chez Sukhoi, si on veut bien me permettre cette approximation phonétique (3).

Il y a ensuite un rappel sur le fonctionnement de l’économie soviétique, puis de son basculement dans la Russie « moderne » et le capitalisme. C’est peu commun pour un livre d’aviation, mais on comprend la nécessité de cet exposé quand il va falloir, un beau jour, fixer un prix de vente pour les exportations.

Enfin nous est expliquée l’organisation des sports aériens soviétiques puis russes. A cette occasion, une petite remarque : il est dommage d’attendre la page 35 pour trouver l’explication de l’acronyme DOSAAF alors qu’on trouve ce sigle sept fois auparavant (4), en essayant de deviner ce que peut en être la signification. C’est d’autant plus regrettable que la plupart des termes et des noms de firmes sont bien explicités, au fil du récit, par des notes de bas de page : COMECON, Tsagi, OKB, Luylka, etc.

Les pages 44 à 102 constituent ensuite le corps du sujet, les monographies consacrées aux Sukhoi 26, 29, 29T, 31 et 31M. Chacun de ces appareils est décrit très précisément : Génèse, contexte, technique (fuselage, aile, train d’atterrissage, moteur, équipement), particularité en vol, versions, caractéristiques…  On apprécie à ce moment le profil particulier de l’auteur. Gautier Guérard est pilote de voltige de haut niveau, et instructeur de la discipline. Lorsqu’il nous présente l’utilisation de ces machines, il est aux commandes et nous avons ses sensations de pilote, le fait d’avoir à « hurler » un message de sécurité avant de démarrer, les particularités du démarrage pneumatique, le moteur en étoile, le manque de visibilité au roulage, le décollage « 3 points » pour protéger l’hélice, le sens de rotation contraire du moteur à compenser, etc.

Le tout est illustré de nombreuses photos, principalement en couleur, de tableaux, de plans 3-vues, et enrichi par l’inclusion de multiples encarts nous présentant les personnages remarquables qui ont forgé cette histoire.

La seconde moitié de l’ouvrage complète tout cela en nous présentant les concurrents russes de Sukhoi, ce qui constitue un catalogue intéressant, une focalisation sur les moteurs, quelques Su à l’étranger, les ultimes développement, les compétitions (histoire et généralités sur le contenu), les compétiteurs (et entraîneurs), et plein de choses à découvrir.

En annexe, on trouve des tableaux et, sous forme de QR-codes, des listes de production, ainsi que les résultats en compétition.

Les remerciements de fin d’ouvrage reviennent sur la mention, faite en avant-propos, d’une grande quantité de pilotes et d’experts de haut niveau qui ont contribué, sous une forme ou une autre, au contenu et à la qualité de cet ouvrage.

Ce sont ainsi 25 années de vols sous fort facteur de charge que vous allez découvrir.

Jean-Noël Violette

Notes :
(1) Exemple : quel est le rapport, chez Yakovlev, entre un Yak-18T, quadriplace de voyage, et un Yak-18 de voltige ? Sont-ils de la lignée des légendaires Yak-3 et Yak-9 ?

(2) Et pas que les plus jeunes, j’ai eu plaisir à découvrir le paragraphe sur le Mai-303 Kvant.

(3) L’auteur explique la remise à zéro des numérotations des Sukhoi à la mort de Staline (1953), date de retour en grâce de plusieurs constructeurs soviétiques, écartés jusque-là par les purges successives. Exemple : on comprend mieux qu’il existe ainsi des Su-7 à piston et des Su-7 à réaction…

(4) pages 11, 12, 12, 14, 16, 18 et 20

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ISBN 9782383951469 212 pages, 16×24 cm, broché, couverture souple 30 €